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Trump au pouvoir : où allons-nous ?

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Ne nous voilons pas la face, l’arrivée au pouvoir imminente d’un Donald Trump omnipotent dans son pays, et apôtre de l’égoïsme national (« America first »), accentue la fragilité et la conflictualité globale.

Trump fragilisera la santé écologique planétaire. Pour lui, il l’a écrit, le réchauffement climatique est une fake news inventée par la Chine pour limiter la compétitivité de l’industrie américaine ! Il cherchera à saborder les accords de Paris et tout autre engagement de son pays en faveur du respect des limites planétaires : pollution des sols et des océans, etc. Son élection a d’ailleurs éclipsé dans les média l’échec total, ce 1er novembre 2024, de la COP 16 de Cali dédiée à la biodiversité…  

Il fragilisera l’économie mondiale puisque la mise en œuvre de son programme protectionniste déclencherait, selon les spécialistes, un fort ralentissement de l’économie mondiale, y compris américaine.

Il fragilisera la sécurité humaine. Accorder, comme il l’a annoncé, des gains territoriaux à Vladimir Poutine afin d’arrêter la guerre, ce serait récompenser l’agresseur et l’encourager à entreprendre d’autres guerres de conquête, c’est organiser un nouveau Munich, façon Chamberlain et Daladier en 1938. Le soutien de Trump envers l’Etat d’Israël, encore plus inconditionnel que celui de ses prédécesseurs, l’empêchera d’engager la région dans un processus de réparations et de paix. Son désengagement vis-à-vis de l’Alliance atlantique laissera l’Europe pratiquement incapable de défendre son propre territoire, disposant des seules armes nucléaires de la France, et de capacités militaires conventionnelles disparates.

L’Europe et la France ne sont pas à l’abri désormais d’attaques aériennes massives combinant missiles balistiques, missiles de croisière, missiles hypersoniques et drones. Pessimistes ou juste prudentes, la Finlande et la Suède préparent actuellement leurs citoyens à  une guerre possible avec la Russie.

Ces escalades encore inimaginables il y a quelques années peuvent devenir réalité du fait de l’erreur d’appréciation la plus fréquente et répétée de l’histoire : penser qu’on peut régler les différends par la force. Non contents de provoquer des catastrophes humanitaires sans jamais atteindre les objectifs politiques qu’ils s’étaient fixés, les dizaines de conflits armés qu’ont connus ces dernières décennies se sont doublés d’une redoutable escalade de la violence qui ne s’embarrasse d’aucune règle internationale ou limite posée par le droit humanitaire. Or, si chacun des peuples de la terre entreprenait de régler ses conflits avec ses voisins par la guerre, l’efficacité destructrice des armements à présent si largement diffusés sur la planète viendrait vite à bout de l’humanité, par la dégradation importante du système économique, alimentaire et de santé, et par l’accumulation des catastrophes écologiques.

S’enfermer dans une logique de compétition pure et dure entre des Etats adeptes du chacun pour soi au moment où les défis planétaires exigent de toute évidence une solidarité et une coordination accrue, c’est engager l’humanité dans une voie sans issue. C’est pourtant l’option qui semble de plus en plus plébiscitée actuellement, que ce soit aux Etats-Unis ou dans les pays européens. Il est temps de se rappeler de ce que disait Albert Camus : « J’aime trop mon pays pour être nationaliste. » Il est temps, en effet, de se rappeler qu’il est impossible pour un pays de prospérer seul au milieu d’un océan de misère.  

Car, oui, il y a 45 ans, le Rapport Nord-Sud annonçait une pression migratoire presque impossible à endiguer si rien n’était fait pour développer l’économie des pays les plus pauvres et subvenir dans la dignité aux besoins des populations. Aujourd’hui, sur fond de d’absence de sécurité personnelle dans les pays pauvres, sans emploi ou moyen de subsistance localement, face également à la dégradation des conditions d’existence liées à la crise climatique, la pression migratoire est bel et bien devenue impossible à endiguer quels que soient les dispositifs répressifs imaginés par les gouvernements des pays riches. Où en serons-nous dans 40 ans quand les avertissements du GIEC auront été écartés des agendas politiques par des démagogues opportunistes comme Donald Trump ?
 
Face à la perspective d’une présidence Trump aussi catastrophique, que pouvons-nous faire pour anticiper et en combattre les effets délétères ?

Il est tout d’abord indispensable que l’Europe soit véritablement unie. Un approfondissement des relations doit à présent succéder à l’élargissement et, pour contourner les mauvaises volontés ponctuelles de tel ou tel partenaire, il pourrait être concevable qu’une coordination plus étroite soit réalisée entre un ensemble plus réduit de pays, formant un bloc dont le poids cumulé assurerait le leadership efficace. Les citoyens que nous sommes peuvent naturellement s’engager davantage pour assurer un soutien à une Europe plus unie, sur le plan politique comme sur le plan humain.  

L’intégration politique européenne permettra aux Européens d’assurer eux-mêmes leur prospérité économique, leur sécurité militaire, la promotion de la transition écologique et des valeurs humanistes et démocratiques. La participation personnelle et active de nombreux citoyens permettra à cette Europe de s’appuyer sur des relais actifs, traits d’union entre les populations, se connaissant les uns les autres et se reconnaissant parfois différents, souvent semblables, et en tous cas amis.  

La lutte contre la corruption est également une dimension essentielle pour assurer l’efficacité de l’aide au développement et le progrès des conditions d’existence dans les pays sous-développés, seule manière réaliste de faire baisser la pression migratoire. Elle doit figurer au premier plan des politiques intérieures et extérieures de nos pays, et s’étendre à la question de tous les flux financiers illicites y compris l’évasion fiscale. L’aide au développement et à l’investissement productif doit elle aussi faire partie des priorités (et non être réduite), son efficacité pouvant être améliorée par la création de zones temporairement protégées contre la compétition internationale pour permettre aux petites pousses de prendre racine.
 
L’urgence est là, alors puisque les chantiers ne manquent pas, allons-y, chacun à notre niveau.

 

Antoine Jaulmes

Vice-président

Association Initiatives et Changement France

Membre d’Initiatives of Change International